Vannes avec Marc Laubier, silence avec Roberto Vilar · On a voulu se mocquer de la Bible
- Q
- Quel est le passage le plus absurde dans la bible ?
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- Marc Laubier
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- Mis à jour le 21 nov. 2018
- Q : Quel est le passage le plus absurde dans la bible ?
vocabulaire
D’abord, il faudrait savoir ce que vous entendez par “absurde” ? Est-ce :
Contraire à la raison, au bon sens, à la logique ?
comme chez Camus, un divorce entre l'homme et le monde ?
Personnellement, j’ajouterais un divorce entre le lecteur et la littérature. Il n’y a aucun doute que , pour peu qu’on ignore l’existence de genres littéraires propres aux récits des civilisations anciennes et qu’on ne sache pas les identifier, pratiquement tous les textes de la Bible sont “absurdes” faute de connaissance des logiques pré-cartésiennes.
A la décharge des lecteurs contemporains :
les indices permettant de reconnaître les genres littéraires sont plus évidents dans la langue d’origine (jeux de mots, calembours, expressions toutes faites )
On n’enseigne plus les humanités classiques dans les école secondaires. Les langues anciennes et les textes qui les diffusent, n’ouvrent aucune “rentabilité”, n’est-ce pas ?
On n’enseigne plus les figures du discours nonplus que les systèmes esthétiques que sont les genres littéraires en général . La façon dont certains lisent la Bible amene à s’interroger sur la façon dont ils comprennent Molière ou Montaigne
L’effet le plus remarquable de ces lacunes dans l’enseignement est l’identique herméneutique partagée par les athées militants et les fondamentalistes. La seule façon de rendre un mythe absurde consiste à le matérialiser, à le confondre avec une chronique ou un reportage d’investigation.
retour au texte
Le mythe des filles de Loth est parfait pour expliquer ça. Le littéraliste ne voit que “alcoolisme et inceste”. Il zappe la préoccupation de la descendance. Il ne s’interroge pas un instant sur le fait que les filles de Loth disent que leur père est sans descendance.
Quand on a deux sous de connaissance de ces civilisations anciennes facilement endogames, on comprend “sans descendance mâle “ susceptible de fonder une tribu.
En même temps, on se souvient de la loi du Lévirat qui impose au frère d'un défunt d'épouser la veuve sans enfants de celui-ci afin de lui donner une descendance symbolique. Les filles de Loth reprennent cette loi à leur compte. En quelque sorte, elles dépassent la condition féminine.
Cette interprétation peut sembler tirée par les cheveux mais un jeu de mots à la fin du verset Gn 19:30 (je la fais en caractères latins ‘besvoar’ ; cela se trouve dans le dico) peut se lire “crainte de demeurer à Zoar” (nom de ville) ou “crainte de demeurer dans l’insignifiance” .
C’est ce jeu de mots qui alerte le lecteur (ou l’auditeur à l’époque)sur le genre qui n’est pas une chronique. Pas de chance, la traduction ne rend pas cette ambiguïté. Donc, les filles de Loth entendent sortir de l’insignifiance et donner naissance à un peuple. Le texte ne condamne pas l’entreprise et c’est surprenant quand on pense combien il est, d’ordinaire, chichiteux sur les affaires de sexe. Elles donnent naissance chacune à un peuple.
Il y a donc 3 façons de comprendre ce texte :
le littéralisme moralisateur : “la Bible prône l’inceste et l’alcoolisme. Pouah, absurde !”
une lecture juridique: la loi du Lévirat doit-elle être étendue aux femmes ? N’est-ce pas un extrémisme que de l’étendre ?
une lecture féministe : en cas d’urgence, les femmes sont-elles appelées à prendre l’avenir des peuples en charge ? la question s’articule avec la femme de Loth transformée en statue de sel pour avoir regardé derrière elle, vers le passé au lieu de penser et se préparer à l’avenir.
On remarquera que le mythe pose plus de questions qu’il ne donne de réponse. Il n’y a pas de texte absurde pour qui sait lire.
- I
- Hans-Georg Lundahl
- 22 novembre
- Hans-Georg Lundahl
- La présence d'un calembour n'indique pas la présence d'une fiction.
- Marc Laubier
- Auteur d'origine
- 22 novembre
- aviez-vous repéré le calembour vous même ? pouvez vous documenter l'existence historique de Loth et leur séjour à Zoar ?
- Hans-Georg Lundahl
- 27 novembre
- Non, je ne l'ai pas repéré moi-même, mais j'insiste sur le principe : un calembour n'indique pas forcément une fiction.
La documentation se trouve dans le livre de la Genèse.
- Marc Laubier
- Auteur d'origine
- 27 novembre
- Donc, vous n'aviez jamais envisagé qu'il pouvait y avoir un calembour à cet endroit ? A votre avis, combien y a-t-il de calembours de cet ordre dans Genèse 1 à 4 ?
- Hans-Georg Lundahl
- 27 novembre
- Probablement un nombre.
Ce qui non plus ne prouve la fiction.
Comme l'allégorie, aussi le calembour est à portée de la Toutepuissance de Dieu à mettre dans les événements réels.
- Marc Laubier
- Auteur d'origine
- 27 novembre
- On est donc bien d'accord :
vous ne savez pas combien il y en a
vous ne connaissez pas le contexte de ceux-ci
Se pourrait-il, enfin, que vous lisiez la chose en français ??
- Hans-Georg Lundahl
- 28 novembre
- Ou en anglais ou latin ou grec.
Oui, on est d'accord.
Et d'où voulez-vous en conclure à la fiction?
- Marc Laubier
- Auteur d'origine
- 28 novembre
- La traduction grecque ou latine ne rend ni les jeux de mots ni le contexte de ceux-ci.
pour le jeu de mots que j'évoque, ἐκ σηγωρ n'a rien à voir avec ασημαντότητα.
Vous ne pouvez donc rien affirmer sur le rôle et le sens des jeu xde mots hébreux d'autant qu'on a constaté ensemble que vous ne savez pas où sont les autres non plus que à quoi ils servent là où ils sont.
Ce n'est pas de chance pour votre affirmation.
- Hans-Georg Lundahl
- 29 novembre
- "La traduction grecque ou latine ne rend ni les jeux de mots ni le contexte de ceux-ci."
Admis.
"pour le jeu de mots que j'évoque, ἐκ σηγωρ n'a rien à voir avec ασημαντότητα."
Admis.
"Vous ne pouvez donc rien affirmer sur le rôle et le sens des jeu xde mots hébreux …"
Admis, mais sans pertinence pour la question de vérité historique ou fiction.
"Ce n'est pas de chance pour votre affirmation."
Mon affirmation part de principe théologique. Elle tient dans les deux cas, ou tout cas imaginable sur les calembours.
- II
- Roberto Vilar
- 5 septembre
- Roberto Vilar
- Comme le mythe de Tamar quelques générations plus tard. Une femme qui, par sa transgression, donne naissance à la lignée de David et Jesus.
- Marc Laubier
- Auteur d'origine
- 5 septembre
- Dans le cas de Thamar, j'aurais tendance à parler de midrash plutôt que de mythe mais comme je n'ai pas étudié le texte avec autant d'attention que celui des filles de Loth, je préfère la fermer.
Ceci montre que quand les femmes prennent des décisions de leur cru, il se passe des choses intéressantes. Dire qu'il y a des gens qui continuent de faire croire que la Bible est un texte misogyne !
- Roberto Vilar
- 5 septembre
- Absolument
Leur pulsion de vie renverse les tentations organisatrices morbides des hommes.
- Hans-Georg Lundahl
- 27 novembre
- Les deux, pourquoi le récit sur Thamar serait-il un "mythe"?
Et, si des récits bibliques peuvent être "mythes" est-ce que des récits en Homère peuvent alors être "récits bibliques"?
Après ceci eut lieu l'autre débat.
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